Le Gouvernement du Grand-Duché du Luxembourg

Business Partnership Facility: retours d’expériences

Alors qu’un nouvel appel à projets est en cours jusqu’au 20 octobre pour bénéficier du mécanisme de co-financement BPF, les premières entreprises à en avoir bénéficié témoignent.

Business Partnership FacilityBusiness Partnership Facility est un outil de financement visant à encourager des partenariats entre des entreprises luxembourgeoises (ou européennes) et des partenaires (entreprises, administrations ou société civile) basés dans des pays en voie de développement, afin de mettre en place des projets commerciaux durables.

Initié par la Direction de la Coopération au développement et de l’action humanitaire du ministère des Affaires étrangères et européennes, il est mis en œuvre par LuxDev, l’agence luxembourgeoise pour la Coopération au développement, en partenariat avec la Chambre de Commerce et Luxinnovation.

Le cofinancement proposé, sous forme de subventions, peut atteindre jusqu’à 50% du budget total du projet, avec un maximum de 200.000 euros.

Depuis son lancement en 2016, la BPF a soutenu 34 projets, majoritairement en Afrique, pour un montant moyen de cofinancement de 142.000 euros. La BPF a ainsi permis aux entreprises luxembourgeoises soutenues de découvrir de nouveaux marchés, tout en contribuant au développement des pays dans lesquels elles interviennent.

En voici deux illustrations concrètes :

 Jway: des téléprocédures au Sénégal

Business Partnership FacilityDepuis plus de 20 ans, la société Jway, acteur de l’économie sociale et solidaire – qui fut à son origine hébergée au Technoport avant de voler de ses propres ailes – a développé des services et des solutions visant à accompagner et à faciliter la digitalisation des entreprises et des institutions.

Cela va même jusqu’aux plus hautes sphères étatiques, puisque la société s’est engagée dans un projet intitulé «Socle de dématérialisation des procédures administratives de l’État du Sénégal». «Il s’agit d’accélérer la digitalisation des services publics au Sénégal et de soutenir l’appareil étatique dans la mise en place d’une démarche d’aide au citoyen à travers l’industrialisation du développement des ‘téléprocédures’», explique Joseph Nana, directeur général Jway Africa, en charge de l’implémentation de ce projet.

L’objectif est double: doter l’État du Sénégal d’un socle standard de dématérialisation de procédures administratives qui puisse être utilisé, dans la durée, par toutes les administrations du pays, puis transférer le savoir-faire de l’entreprise à l’agence nationale Senegal Numérique (Senum), afin d’industrialiser la production des procédures en vue de digitaliser la grande majorité des plus de 700 démarches administratives recensées à ce jour. «Notre mission consiste à fournir une solution de digitalisation et un accompagnement sur le long terme», indique M. Nana.

Il ne s’agit, pourtant, que d’une première étape, car le but ultime est de doter Senum, dans la durée, d’une méthode et d’un progiciel dédié à l’industrialisation de la création des téléprocédures et leur processus de gestion par l’administration. «Une fois notre plateforme mise en œuvre, chaque administration pourra ainsi soumettre ses termes de références et attendre en retour, et dans les délais les plus brefs, un service en ligne adapté tout en restant standard et efficace.»

En amont de ce projet co-financé par le mécanisme BPF, Luxinnovation a été très présent dans l’accompagnement de Jway pendant la phase de présélection. «Nous avons notamment été aidés pour le remplissage des différents tableaux financiers liés à la formalisation du projet. Même si cela était assez fastidieux, ces tableaux nous ont permis de structurer le projet en vue de sa réussite.»

De son côté, LuxDev est intervenue – et continue d’intervenir – pour accompagner la société dans la phase opérationnelle du projet qui est encore en cours de réalisation. Dans un premier temps, le processus d’industrialisation de la digitalisation des procédures administratives de l’État est initié avec un nombre limité de cas concrets. «L’importance du choix de ces premières téléprocédures est crucial», note M. Nana. «Elles doivent initier et servir de base au reste du projet. Nous visons plutôt un premier lot de 7 démarches en ligne simples, qui serviront alors d’exemple, plutôt que de viser quelques démarches en moins, mais plus complexes.»

Cette phase s’accompagne aussi de la formation de trois utilisateurs du Senum afin de les rendre autonomes dans la création de formulaires et la mise en place de workflows.

«Au stade actuel, nous avons constitué l’équipe projet au sein de Senegal Numérique. Les téléprocédures à dématérialiser sont en cours de sélection et concerneront en priorité ce qu’on appelle les évènements de vie, tels que recommandé par le plan stratégique e-Gov du Sénégal», indique M. Nana.

InTech: la technologie au service des victimes de guerres

Société de services informatiques appartenant au groupe Post, InTech compte, depuis 2018, un département dédié à l’innovation qui a pour ambition d’explorer les nouvelles tendances et technologies IT et de les appliquer sur des projets à caractère innovant. «Nous nous sommes dès le départ tournés vers l’économie sociale et solidaire, car nous nous sommes rendus compte que beaucoup d’associations ne disposaient pas de compétences informatiques et représentaient ainsi pour nous un laboratoire d’innovation idéal», expliquent Sébastien Larose, Directeur Innovation, et Nicolas André, Manager, chez InTech. «Nous nous sommes alors rapprochés de l’incubateur ShareIT, hébergé par Station F à Paris.»

Rapidement, un premier projet s’est construit avec l’organisation non gouvernementale We are NOT Weapons of War, portée par sa fondatrice Céline Bardet. L’idée est simple: proposer au plus grand nombre un outil digital dont l’objectif est d’apporter une assistance et un soutien aux victimes de violences sexuelles (mais pas uniquement) dans le cadre de conflits armés, notamment grâce au recueil des témoignages de victimes pouvant ensuite servir de preuves légales en cas d’actions en justice ultérieures, notamment auprès de la Cour Pénale Internationale.

Ainsi est né le projet de l’outil Backup. «Nous avons alors travaillé sur une application web accessible sur mobile et adaptée à des populations aux niveaux de lettrismes très fluctuants, permettant la collecte de témoignages à grande échelle, un accompagnement sur le terrain lorsque cela est nécessaire, et enfin la notarialisation des témoignages au sens légal, c’est-à-dire la conservation d’une preuve numérique grâce à l’aide de la technologie Blockchain», précise M. André.

La mise au point de l’outil technologique n’a pas été la partie le plus complexe du projet car c’est bien l’enjeu humain qui s’est rapidement imposé de lui-même. Ainsi, si cette application a, initialement, été conçue directement pour les victimes, les observations faites par Céline Bardet et son équipe ont rapidement montré qu’il fallait, au moins dans un premier temps, s’appuyer sur des représentants locaux partenaires pour accompagner les populations dans l’appropriation de l’outil, notamment au travers de l’établissement d’une relation de confiance avec les victimes.

En 2019, à l’occasion de la conférence Stand Speak Rise Up, Intech eu l’opportunité d’évoquer l’outil Backup, soutenu par la Grande-Duchesse Maria-Teresa, auprès d’une population particulièrement sensible et éveillée aux enjeux adressés par l’application. «Nous avons rencontré des représentants du ministère du ministère de l’Économie qui nous ont parlé de BPF et de ces options de financement. C’est ainsi que nous avons travaillé sur le dossier» se souvient M. Larose. «Clairement, le co-financement de BPF nous a permis de passer du stade de Proof of Concept à celui de la production même de l’outil.»

Initialement, Backup était destinée à être déployé en Guinée-Conakry. Mais la situation politique et le contexte général dans cet État d’Afrique de l’Ouest, en plus de la crise sanitaire liée au Covid, n’ont pas permis le déploiement espéré sur place. Un contretemps qui a amené les concepteurs de l’application à revoir leur copie et à repositionner leur stratégie vers une nouvelle interface graphique et de nouvelles fonctionnalités permettant un déploiement simplifié de la plateforme quel que soit le pays visé.

Entre temps, la guerre en Ukraine a rebattu les cartes et rendu évidente la nécessité de déployer l’application dans ce contexte géopolitique, tout en prenant soin de s’adjoindre les services cybersécurité de la maison-mère, Post, afin d’améliorer au maximum la sécurité de l’outil et de la rendre compatible avec les exigences de sécurité nécessaires en matière de protection des données personnelles. «Nous avons évidemment un fort devoir moral de protéger particulièrement ces données-là, car des vies sont directement en jeu», indique M. André.

Avit Blanchy LuxinnovationStimuler l’innovation

Ces deux exemples illustrent parfaitement l’évolution du contexte en matière d’adoption rapide des nouvelles technologies et, dans le même temps, une augmentation de cas d’usages distincts des applications d’origine, en fonction des contextes économiques ou socio-culturels d’adoption.

«S’agissant des pays dits ‘en développement’, la réponse aux défis qui leur sont propres semble moins devoir venir d’un simple rattrapage des modes de production et de consommation occidentaux, que de l’adaptation innovante à leurs propres cas d’usages des dernières technologies globalisées», constate Avit Blanchy.

À cet égard, les projets soutenus par la BPF offre une formidable opportunité pour les entreprises européennes innovantes d’explorer de nouveaux marchés, de nouveaux cas d’usages, et de stimuler leur capacité d’innovation au travers de ces collaborations.

La mission globale de Luxinnovation consiste à promouvoir l’innovation au service de l’économie et de la société luxembourgeoise. «Le partenariat avec LuxDev autour de la BPF nous permet d’ajouter à cette mission une dimension inclusive vis-à-vis d’autres économies et d’autres populations, dont le Luxembourg est naturellement solidaire.»

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