Le Gouvernement du Grand-Duché du Luxembourg

Les enjeux de la construction durable

Une conférence dédiée à la construction durable pour les villes résilientes 2.0 aura lieu le 23 mai prochain. Regards croisés sur cet événement avec les trois organisateurs (LIST, Luxinnovation et Neobuild).

Après le succès de la première édition en juillet 2023, le LIST, Luxinnovation et Neobuild s’associent de nouveau pour un nouvel événement dédié à la construction durable. Il se déroulera le 23 mai prochain dans le bâtiment Neobuild à Bettembourg.

Les leaders du secteur, innovateurs et passionnés de durabilité se réuniront pour plonger dans les problématiques environnementales pressantes auxquelles est confrontée la construction au Luxembourg aujourd'hui.

Keynote speakers et table ronde permettront, en matinée, d'échanger sur les meilleures pratiques et les défis à relever. Des ateliers organisés en parallèle, l‘après-midi, permettront d’aborder les défis spécifiques aux thématiques de la chaleur fatale, de la réutilisation de l'eau et de la circularité des ressources et logistique sur les chantiers. 

Nous avons rencontré Perla El Boueiz (Partnership Officer Construction au LIST), Charles-Albert Florentin (Manager – CleanTech Cluster à Luxinnovation) et Luc Meyer (Ingénieur technique – Directeur à Neobuild) pour nous présenter les grandes lignes de cet événement. 

Comment décririez-vous l’enjeu de la construction durable de manière générale? 

Perla El Boueiz (LIST): «Le défi est de minimiser l'impact environnemental tout en assurant la durabilité sociale et économique des bâtiments. Cela implique l'utilisation de matériaux écologiques, une gestion efficace des ressources et une conception axée sur l'efficacité énergétique et le bien-être.»

Luc Meyer (Neobuild): «Il est multiple. D'une part, on peut parler de ‘construction’ en termes de process (digitalisation/automatisation / numérisation / hors site (DFMA-D) et d’autre part de ‘durabilité’ au niveau du bâti en lui même ( circularité, matériaux géo et biosourcés, bâtiments sains et intelligents, techniques/ technologies durables, empreinte carbone et gestion/revalorisation des déchets). »

Charles-Albert Florentin (Luxinnovation): «Une construction plus durable passe, selon moi, par l’optimisation de la consommation d’énergie tout au long de la vie d’un projet et par l’utilisation intelligente des matières premières disponibles. Ceci afin d’assurer une meilleure qualité environnementale, économique et sociale à long terme.»

Quelles sont, pour vous, les prochaines étapes-clés devant permettre d’aller encore plus loin dans ce domaine?

P. E. B.: «L'innovation est un moteur essentiel pour l’évolution du secteur de la construction. Son intégration dans l’expertise du métier permet d’accélérer et de réussir la transformation holistique du secteur. Et ceci sur plusieurs axes: la décarbonisation des industries traditionnelles, le développement de matériaux écoresponsables, l’implémentation du process BIM (Building Information Modeling), l’intégration des solutions d'énergie renouvelable, la gestion intelligente et optimale des ressources, etc.»

C.-A. F.: «Il faudrait encourager l’utilisation systématique des outils existants destinés à éco-concevoir les bâtiments, améliorer la traçabilité et l’expérience utilisateur avant construction, rationaliser la production d’éléments constitutifs du bâtiment et en parallèle de consommer de préférence des matériaux locaux, sains et de réemploi, d’optimiser la gestion de chantier, d’assurer une maintenance et une rénovation intelligentes du bâtiment, et enfin de faire le choix de la déconstruction sélective.»

L. M.: «Le plus important est ‘la preuve par l'exemple’: montrer que c'est possible et réalisable. Il faut également trouver une nouvelle justesse par la gestion claire des objectifs et des enjeux par typologie de projets.»

Un des workshops est dédié à la circularité des ressources et à la logistique sur les chantiers. Où en est-on au Luxembourg sur la question?

Perla El Boueiz, LISTPerla El Boueiz: «Selon Eurostat, le Luxembourg produit par an, 3 fois plus de déchets que la moyenne européenne rapportée au nombre d’habitants, avec 80% de ces déchets provenant du secteur de la construction. Le taux de circularité des matériaux est également 3 fois plus faible que ce chiffre au niveau européen. 

En ce qui concerne la logistique, c’est souvent une étape sous-estimée ou réfléchie à un stade trop tardif de la construction, pourtant les données disponibles montrent qu’elle représente 10% à 20% des coûts de construction.
Le projet Européen SUCCESS, que le LIST a coordonné, a permis de démontrer la pertinence économique et environnementale de la logistique mutualisée. Il s’agit de passer maintenant à la vitesse supérieure avec la mise en place de Centres de Consolidations pour la Construction (CCC) comme à Londres, Bruxelles, Stockholm, Paris, Lyon… pour permettre une gestion efficace et circulaire des matériaux de construction.»

Comment faire en sorte que les entreprises de construction soient davantage sensibilisées à cette problématique?

P. E. B.: « Des guides de support pour l’élaboration de l’inventaire des matériaux et pour l’aide à la déconstruction ont été développés par le LIST, en collaboration avec le ministère de l’Environnement, afin de sensibiliser et d’aider les acteurs publics et privés dans leurs démarches. Et pour convaincre les acteurs d’un secteur comme celui de la construction, il est indispensable de démontrer l’impact positif de l’innovation dans des projets réels. Le LIST a mené 3 cas pilotes de logistique mutualisée et à pied d’œuvre au Luxembourg avec nos partenaires CLE, CFL Logistics et Polygone. 

Une livraison des matériaux nécessaires au bon endroit et au bon moment a permis une réduction d’un facteur de 3 du nombre de livraisons sur chantier tout en réduisant de 5% le coût des travaux, grâce à une augmentation de la productivité de plus de 15%. Pour permettre la diffusion de ces résultats à l’échelle du secteur, nous avons développé l’outil digital TwiSCO qui permet l’anticipation des contraintes de livraisons sur chantier et l’optimisation des livraisons. 

Enfin, pour favoriser le changement, les décideurs publics ont un rôle important à jouer.»

Pour favoriser le changement, les décideurs publics ont un rôle important à jouer.
Perla El Boueiz (LIST)

Un autre workshop est dédié à la réutilisation de l’eau. Où en est-on au Luxembourg sur la question? 

Luc Meyer - NeobuildLuc Meyer: «La réutilisation est un sujet assez sensible, de petites initiatives existent mais elle restent uniquement limitées à de la réutilisation de l'eau grise. Les différentes législations restent encore assez timides sur le sujet à l'échelle nationale.»

Comment faire en sorte que les entreprises soient davantage sensibilisées à la mise en œuvre de techniques de réutilisation de l’eau? 

L. M.: «Les techniques et technologies existent bel et bien pour des applications assez simple. Pour des solutions en rupture totale, il reste encore un peu de développement mais cette thématique a un avenir prometteur»

Le plus important est ‘la preuve par l'exemple’: montrer que c'est possible et réalisable.
Luc Meyer (Neobuild)

Le dernier des workshops est dédié à la chaleur fatale. Où en est-on au Luxembourg sur la question? 

Charles-Albert Florentin - LuxinnovationCharles-Albert Florentin: «La directive européenne sur l’efficacité énergétique (Energy Efficiency Directive no 2023/1791) reprend la thématique de récupération de chaleur fatale et introduit des régimes d’obligation en matière d’efficacité énergétique (EEOS).
Au Luxembourg, les efforts de réduction de la consommation énergétique, notamment à travers la récupération de chaleur fatale, s’appuient sur le plan National Energie Climat (PNEC) et sur la transposition future de la directive EED.»

Comment faire en sorte que les entreprises notamment industrielles soient davantage sensibilisées à la mise en œuvre de techniques de récupération de chaleur fatale? 

C.-A. F.: «À l’avenir, informer plus régulièrement les acteurs privés sera nécessaire, en présentant des solutions technologiques innovantes à moindre coût et les aides financières associées. Ceci doit être envisagé dès la conception de nouvelles installations. Il convient donc de réfléchir en amont plutôt que de compenser.»

Il convient de réfléchir en amont plutôt que de compenser.
Charles-Albert Florentin (Luxinnovation)

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