La première station publique à hydrogène du pays sera opérée en 2023 par TotalEnergies. Une avancée technologique dont la société Haesaerts Luxembourg va directement profiter pour le développement d’une flotte de camions de type «Dual Fuel».
Transporteur routier et multimodal luxembourgeois basé à Livange, membre du groupe Altrea Logistics, est un spécialiste du transport citernier pour des produits chimiques liquides, gaz et cryogéniques en citerne.
Après quatre années de recherche et de développement menés par la société CMB Tech, la société est désormais sur le point de mettre en circulation un camion fonctionnant selon le principe du «Dual fuel», alimenté par un mélange de diesel traditionnel et d’hydrogène. «Cela se fait en mode ‘Retro-fit’», explique Luc Haesaerts, directeur de Haesaerts Luxembourg. «La base est constituée par un véhicule standard neuf sorti de la chaîne de production du constructeur et nous y apposons la technologie CMB Tech permettant d’injecter de l’hydrogène avec le diesel.»
En fonctionnement, le camion ainsi équipé dispose d’une autonomie de 450 km en fonctionnement «Dual fuel» et, lorsque la réserve en hydrogène est épuisée, il continue de rouler sur le seul carburant diesel.
«L’adjonction d’hydrogène au diesel permet de diminuer drastiquement les émissions polluantes», se réjouit Anthony Auert, le manager du Luxembourg AutoMobility Cluster. «Elle n’est pas aussi efficace qu’une solution purement électrique, mais elle représente une solution de transition tout à fait séduisante, puisqu’elle supporte la décarbonisation des flottes de camions existantes tout en maintenant une autonomie satisfaisante. Sans oublier que l’adjonction du kit dual fuel ne compromet en rien l’entretien des camions dans le réseau traditionnel.»
En outre, le kit dual fuel peut s’adapter à d’autres véhicules propulsés au diesel, moyennant quelques adaptations notamment au niveau du calculateur gérant le mix diesel-H2. «Cela ouvre des perspectives fantastiques pour décarboner des secteurs tels que la construction ou l’agriculture», note M. Auert.
«La molécule hydrogène est une molécule que nous connaissons depuis des décennies, puisque nous la transportons», explique M. Haesaerts. «Cette technologie permet de réduire les émissions de CO2 de 98% par rapport à un camion normal en utilisant de l’hydrogène et du carburant synthétique à base d’huile végétale hydrotraitée (HVO). Remplacer le carburant diesel traditionnel par du HVO a permis de maximaliser la réduction de CO2. Mais pour l’heure, le frein au développement de l’hydrogène en mobilité, c’est le manque de stations de ravitaillement.» Actuellement, le nombre de pompes à hydrogène ou à HVO se compte en effet sur les doigts d’une main dans la Grande région.
Au Luxembourg, la station présentée par TotalEnergie sera la première du genre. Sa mise en service est prévue vers fin 2022/début 2023 au cœur de la ZAE Wolser A à Bettembourg, dans le centre routier sécurisé de l’Eurohub Sud des CFL, et ce, dans le cadre du projet européen «H2Benelux».
Il s’agit, clairement, d’une révolution en vue dans le monde du transport routier, et c’est depuis le Luxembourg qu’elle est en train de se mettre en place. Et la raison principale est, aux yeux de M. Haesaerts, la mobilisation de toutes les parties concernées. «Le ministère de la Mobilité et la Société nationale de contrôle technique ont été très efficaces dans le suivi et le développement de ce dossier. Et nous avons trouvé un partenaire technique de choix avec la société Truck & Bus à Livange, qui héberge le centre de développement des Bus électriques pour le groupe Volvo.»
Luxinnovation est également présente aux côtés de Haesaerts Luxembourg depuis quelques années pour l’accompagner dans sa «démarche» décarbonisation, pour laquelle la société a obtenu des financements «Neistart» de la part du ministère de l’Économie pour le développement du contrôle de son réseau de transport et d’une nouvelle flotte de tanktainers intermodaux, connectés et allégés. «Nous sommes en relation très étroites avec Luxinnovation depuis quelques années et nous nous réjouissons des mises en relation et des bonnes informations que nous recevons de la part des équipes de Luxinnovation.»
Une fois les derniers détails administratifs réglés, le camion présenté à la mi-septembre entrera concrètement en circulation dans les prochaines semaines. Le groupe Haesaerts table sur une livraison d’une vingtaine de ces véhicules «Dual Fuel» par an. Parallèlement, à l’horizon 2032, un objectif de camions «tout hydrogène» est en cours de réflexion.
«Le Luxembourg avec sa position géographique au cœur de l’Europe et ses quelques acteurs importants dans le domaine du poids lourd et de la gestion moteur, a certainement une carte à jouer dans le déploiement de cette technologie innovante», conclut M. Auert.